Bonjour à toi cher Papillon,
Peut-être vis-tu actuellement en étant pris(e) dans la spirale de l’anorexie et de la boulimie, ou que tu en es sorti(e) mais que tu as l’impression de chuter et de ne pas te considérer comme guéri(e) de ce mal de vivre. Tu attends peut-être de cet article une réponse précise. Au risque peut-être de te décevoir, il n’y a pas, selon moi, de oui ou de non à la question « Peut-on guérir de l’anorexie et de la boulimie ? ». Mais je te rassure tout de suite, je souhaite dans cet article te donner des pistes de réflexion sur ce qu’est selon moi la guérison et te donner une vision positive à ce mal-être, te rappeler que tout peut se transformer.
Je m’appelle Céline, je suis maman de deux enfants et infirmière. J’ai souffert d’anorexie et de boulimie durant 6 ans lorsque j’ai commencé mes études au gymnase. Je me comparais déjà depuis petite aux autres avec un sentiment d’infériorité. Je pensais ne pas rentrer dans les normes de beauté et de poids. Je me sentais jugée par les autres. Enfant, je vivais aussi certaines moqueries. Durant le gymnase, je broyais beaucoup de noir et n’arrivais pas à me projeter dans un avenir joyeux. Cela fait 7 ans que je peux dire ne plus souffrir d’anorexie et de boulimie.
Nous ne sommes pas détruits, mais nous avons un pouvoir de création entre nos mains et dans notre coeur.
La guérison
Pour moi, la guérison c’est un processus qui se fait à plusieurs niveaux tout au long de sa vie et qui va au-delà de cases dans lesquelles on essaie de situer l’être humain. Bien sûr, on peut se baser sur des critères théoriques pour donner une certaine objectivité. Durant toute notre vie, je pense que nous sommes amenés à guérir de blessures. Pour cela, je parle de processus, car c’est une relation avec soi-même, son corps, la VIE, avec les autres qui évolue sans cesse. C’est à travers la guérison que l’on développe sa relation à l’Amour pour la vie et à sa sagesse intérieure.
Je n’ai pas cherché à guérir de mon anorexie et de ma boulimie mais c’est lorsque je suis allée à la rencontre de moi-même que les « symptômes » ont au fur et à mesure diminué puis disparu. En me reliant à la part à l’intérieur de moi que j’appellerai ma sagesse intérieure, j’ai pu prendre de la distance avec mes pensées au fur et à mesure.
Même si à un moment donné je me suis dit « ça y est je suis guérie, je ne fais plus de crises de boulimie » ou alors « je ne calcule plus mes calories », ce n’est pas aussi noir et blanc. Car la vie amène des situations où d’anciennes pensées, d’anciennes émotions font surface pour se connecter toujours plus à l’amour à l’intérieur de soi. C’est à travers les expériences où mes croyances, mes limitations et mes peurs ont été confrontées, que j’ai grandi en confiance et en amour pour moi-même. En ayant cette conscience-là, j’ai pu avancer en lâchant prise sur la peur de l’échec.
Une partie de moi pouvait se dire « ça y est je suis sortie de la maladie, je ne vais plus jamais vivre d’émotions désagréables liées à mes troubles du comportement alimentaire », « je suis sauvée et sans challenge ». Mais c’est plus complexe que cela je pense, car la souffrance se situe à un niveau beaucoup plus profond que le trouble du comportement alimentaire qui est lui juste la surface de ce qui se vit à l’intérieur. Donc, si on se concentre que sur la surface et que l’on ne va pas en profondeur, on sera toujours très vite déstabilisé. Lorsqu’on creuse, on peut se rendre compte qu’il y a une souffrance au niveau de l’estime de soi, l’amour de soi, la confiance en soi et bien plus. Donc finalement c’est pour moi plus important d’aller nourrir avec de l’amour toutes les parts brisées à l’intérieur et ensuite je pense le trouble du comportement alimentaire naturellement s’harmonisera avec une écoute de son corps.
La maladie – porte vers l’amour de soi
Etant infirmière, j’utilise dans le cadre de mon travail, des outils et mon analyse clinique pour évaluer et objectiver une évolution d’un problème de santé. On parle de guérison, lorsqu’une plaie par exemple ne présente plus de signes d’infection, d’inflammation ou que celle-ci est cicatrisée. On parle de guérison de maladie lorsque l’on ne souffre plus des symptômes liées à celle-ci. C’est très logique finalement. On se concentre à appliquer des protocoles, des soins pour aller mieux. Mais il est important aussi je pense de voir que la maladie est présente pour nous amener à changer notre regard envers notre corps. Le symptôme cache peut-être un autre malaise intérieur qui demande à être écouté. La guérison n’est donc pas forcément là où l’on portait l’attention en premier lieu mais englobe notre sphère bio-psycho-sociale.
On essaie à tout prix de rejeter la maladie, nous en avons peur. Car la maladie vient nous bousculer dans notre vision de la vie. Dans nos habitudes, dans notre niveau de conscience. Mais la maladie est une porte vers l’amour de soi. Car elle nous amène à guérir des parts blessées non seulement visibles, physiques ou psychiques mais qui sont parfois bien plus profondes. Qui touchent notre relation à nous-même au niveau de l’amour que l’ont ressent pour notre corps, notre humanité.
La peur de rechuter
Lorsque j’ai commencé à aller mieux, j’ai eu une peur à l’intérieur de moi que mes pensées liées à l’anorexie et la boulimie reviennent et me refassent chuter. Au début, il est possible que ça nous fasse rechuter mais finalement chaque chute est une possibilité de trouver ses ressources. On voit les chutes comme négatif et comme un échec surtout lorsqu’on est dans l’ambition et la recherche de perfection. Mais la chute est une bénédiction pour évoluer. Et finalement j’ai compris avec le temps que plus j’ose regarder en face mes pensées et mes émotions, plus je prends de la distance et plus j’apprends à me connaître.
Étant infirmière, je suis confrontée à des personnes ayant des problèmes physiques ou même souffrant de troubles alimentaires. J’avais peur en faisant cette formation d’infirmière de rechuter en me disant que peut être ça pourrait m’atteindre d’être confrontée à des personnes souffrant ou ayant souffert de la même difficulté que moi, j’avais peur de revivre des émotions. Mais finalement j’ai appris qu’en étant dans la confiance, la vérité et l’amour pour moi-même, je pouvais observer les pensées et être en empathie avec l’autre sans me sentir menacée.
Car lorsqu’on a fait ce chemin de se regarder en face, d’aller dans les profondeurs de soi-même et de ses ombres, on peut voir ceux des autres. Et l’autre nous permet de continuer si besoin à voir en nous-même ce qui a besoin encore d’être transformé dans l’amour, vu que l’autre est notre reflet. Aujourd’hui ma capacité à regarder d’anciens schémas de pensées, d’anciennes émotions sans avoir peur qu’elles ne m’atteignent négativement, me permet de parler de cette thématique. D’ouvrir mon cœur sans avoir peur d’être blessée.
S’ouvrir au changement
Dans mon expérience, je n’ai pas visé un poids forme pour dire que je ne souffrais plus d’anorexie ou de boulimie, mais je suis allée à la rencontre de la partie en joie et en amour pour la vie. Cette réconciliation m’a permise de ne plus vouloir me punir, me détruire, me contrôler. Naturellement, mon corps a pu simplement s’exprimer et vivre en étant lui-même, en étant libre. Il est vrai que j’ai fait pas mal de yoyo au niveau de mon poids, mais j’au trouvé au fil du temps mon équilibre.
Pour moi une une grande indication qui m’a permis de dire que j’étais libérée des troubles du comportement alimentaire a été lorsque mon alimentation n’était plus liée à une souffrance pour moi ni à une obsession. Lorsque j’ai pu lâcher prise sur le « comment devait être mon alimentation », mais que j’avais retrouver du plaisir à manger en me sentant bien dans mon corps. Que je n’étais plus dans un contrôle ou une forme d’auto-punition liée à la peur du changement. Lorsque j’étais capable d’accueillir mes émotions sans avoir besoin de faire des crises de boulimie durant lesquelles je me faisais vomir par la suite. Bien sûr, que je peux être tentée par certains aliments « plaisirs » qui remontent le moral comme du chocolat etc… mais je parle vraiment du fait de ne plus faire de crises où je me remplissais de nourriture rapidement, longtemps jusqu’à souffrir de douleurs et que les vomissements étaient un moyen d’essayer de rattraper le coup pour ne pas grossir.
L’individualité
La guérison est un chemin si personnel. Il est important je pense de ne pas se comparer à l’autre mais de s’inspirer plutôt mutuellement pour aller à la rencontre de soi-même. Chacun va pouvoir trouver ses propres outils, ses propres clés pour grandir. Pour cela, l’accompagnement thérapeutique va aussi différer d’une personne à l’autre. Une personne devra peut-être passer par une hospitalisation pour pouvoir trouver des forces, se stabiliser et rester en vie alors qu’une autre personne aura un suivi plutôt en ambulatoire. Une personne devra peut-être vivre cette expérience douloureuse de nombreuses années et depuis son plus jeune âge alors qu’une autre traversera cela quelques mois. Il n’y a pas de juste ou de faux, il y a toujours une possibilité d’apprendre et d’évoluer.
J’ai personnellement aussi été suivie par une psychiatre pendant un temps, deux différentes diététiciennes et mon médecin généraliste de l’époque. Finalement, c’est à travers l’écriture, la méditation, le yoga, les soins énergétiques et naturels que j’ai le plus évolué et pu faire un grand travail de transformation. Mais chacun a son histoire de vie, ses propres choix à faire et son propre chemin d’évolution.
Toutes les expériences qui semblent sur le moment dépourvues de sens, sont en fait plein de richesses lorsqu’on change son regard envers celles-ci. J’ai ressenti beaucoup de culpabilité d’avoir fait vivre un « calvaire » pour mes proches, l’impression d’être passée à côté de ma vie, d’avoir perdu des années précieuses. J’ai fait un travail d’accueil de cette douleur d’échec pour m’en libérer et pour mettre du sens sur cette période difficile. Cela peut prendre du temps pour ressentir même une certaine gratitude, mais cette période de désespoir, de dépression et de troubles du comportement alimentaire fait aussi ma force aujourd’hui et nourrit l’empathie que je ressens aussi pour les autres.
Message de bienveillance
Je partage avec vous mon expérience personnelle, prenez ce qui résonne en vous. Il est important de demander de l’aide à des professionnels de la santé ou des personnes de confiance pour être accompagné selon l’état de santé ou les besoins.
Je reste à disposition si tu souhaites échanger par mail.
La guérison est un voyage vers soi. Lorsque l’on voyage, on explore. On pense se tromper de chemin en cours de route parfois ou de ne pas voir le bout. Mais le plus beau, c’est l’exploration, de vivre l’instant présent comme possibilité d’ouverture à la vie. Ne ne pas s’attacher au résultat ou à l’objectif mais de s’en inspirer pour continuer à rêver. Les voyages sont fait de moments de joie intense, de beauté mais aussi d’épreuves. Je vous invite à vous connecter à toutes les ressources en vous pour les traverser et voir que ces épreuves font partie du voyage de guérison. Voir qu’elles font partie de l’expérience humaine et que nous avons le choix de les voir comme négatives ou positives. Nous pouvons les utiliser pour nous relier encore plus à notre lumière ou les laisser nous détruire.